Les propriétaires d’une bastide de 200 m2 dans le Var réalisent des travaux sans autorisation pour la transformer en un ensemble immobilier de prestige d’une superficie de plus de 900 m2 dans une zone protégée où seuls des agrandissements sont possibles. Ils obtiennent un permis de régularisation, dont la validité est contestée devant le juge administratif, et sont poursuivis au pénal pour infraction au Code de l’urbanisme. Les riverains de la propriété, constitués partie civile, en demandent la démolition.
La cour d’appel condamne le propriétaire à une amende et à la démolition de la construction au titre de l’action pénale, ainsi qu’au versement de dommages et intérêts aux riverains. Ces derniers se pourvoient en cassation, réclamant au titre de l’action civile la réparation entière de leur préjudice par la démolition de la propriété transformée.
La Haute Juridiction leur donne raison : la demande de démolition au titre de l’action civile ne peut être écartée au seul motif qu’elle a déjà été prononcée sur l’action publique. En effet, le Code de l’urbanisme n’interdit pas que la remise en état soit ordonnée cumulativement au titre de l’action publique et au titre de l’action civile. De plus, la démolition était demandée non pas pour faire cesser une situation illicite, mais bien à titre de réparation du préjudice subi par les parties civiles, préjudice qui doit être réparé dans son intégralité.
À noter : 1. On peut se demander quel est l’intérêt, pour une partie civile, d’obtenir la démolition d’une construction illégale au titre de la réparation de son préjudice si celle-ci a déjà été prononcée comme mesure pénale. L’argumentation développée par le pourvoi nous donne une indication : les mesures de démolition ne peuvent faire l’objet d’une exécution forcée par la partie civile que si elles sont prononcées au titre des dispositions civiles. Lorsque la victime d’une infraction craint l’inaction de l’administration, elle a donc tout intérêt à demander la remise en état aux fins de réparation de son préjudice.
2. Quand un permis de construire a été délivré, la démolition ne peut être prononcée comme mesure de réparation que si ce dernier a été annulé pour excès de pouvoir par la juridiction administrative et que la construction est située dans un secteur protégé (C. urb. art. L 480-13). Le prévenu a tenté de se prévaloir de l’existence d’un permis de régularisation, mais en vain. Le permis avait en effet été obtenu frauduleusement, au vu d’un dossier mensonger. La Cour de cassation en déduit qu’il est tout bonnement inexistant, ce qui exclut l’application de l’article L 480-13 du Code de l’urbanisme.
Source : Francis Lefebvre